SOC.
CZ
COUR DE CASSATION
Audience publique du 13 septembre 2023
Cassation
Mme MONGE, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 877 F-D
Pourvoi n° Y 22-17.198
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M.[T]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 14 avril 2022.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023
M. [K] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 22-17.198 contre le jugement rendu le 9 septembre 2021 par le conseil de prud'hommes d'Albertville (section commerce), dans le litige l'opposant à l'association Visas loisirs, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [T], après débats en l'audience publique du 21 juin 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
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Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes d'Albertville, 9 septembre 2021), rendu en dernier ressort, M. [T] a été engagé, en qualité de directeur pour un séjour ski d'une durée de huit jours, par l'association Visas loisirs, par un contrat d'engagement éducatif du 15 février 2020.
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Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 2 juillet 2020, afin notamment d'obtenir le paiement de son salaire et de dommages-intérêts ainsi que la remise de documents de fin de contrat.
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En cours de procédure, l'employeur a transmis à M. [T] les documents de fin de contrat et lui a versé son salaire.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
- Le salarié fait grief au jugement de dire qu'il devra fournir les justificatifs manquants, qu'il reste redevable de la somme de 293,70 euros envers l'employeur au titre du reliquat de l'avance sur régie, qu'à défaut il devra rembourser l'intégralité de l'avance sur régie, et de le condamner à payer à l'employeur une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors « que le juge doit trancher les contestations dont il est saisi ; qu'en l'espèce, les parties s'opposaient sur la régularité de nombreux justificatifs produits par M. [T] pour justifier de l'usage de l'avance sur régie ; que se bornant à juger que M. [T] devra fournir les justificatifs manquants sans identifier préalablement quels étaient les justificatifs régulièrement fournis et ceux qu'ils considéraient comme manquant, les juges du fond ont méconnu l'article 4 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code civil :
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Il résulte de ce texte que le juge ne peut refuser de statuer sur une demande dont il admet le bien-fondé en son principe, au motif de l'insuffisance des preuves fournies par une partie.
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Pour débouter le salarié de sa demande en remboursement au réel de ses frais professionnels, le jugement, après avoir relevé notamment que le salarié avait produit divers éléments dont certains n'étaient pas des factures, que pour une dépense médicale le salarié ne produisait pas l'original de la feuille de soin et qu'il ne fournissait pas l'original de la facture de taxi qu'il avait scannée, retient que les dépenses en lien avec l'activité et pouvant être prises en charge représentent la somme de 926,36 euros.
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Le conseil de prud'hommes en a déduit que le salarié était redevable envers son employeur d'une certaine somme au titre du reliquat de l'avance sur régie s'il fournissait les justificatifs et de la totalité de l'avance s'il ne les fournissait pas.
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En statuant ainsi, alors qu'il ne pouvait, sans méconnaître son office, s'abstenir d'identifier quels étaient les justificatifs pertinents, ceux qui ne pouvaient être retenus et ceux qui manquaient, dès lors qu'il avait constaté que nombre de dépenses avaient été faites en lien avec l'activité, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
- En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation prononcée entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs de dispositif du jugement condamnant le salarié à une certaine somme pour procédure abusive, et de ceux le condamnant aux dépens et au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 septembre 2021, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Albertville ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Chambéry ;
Condamne l'association Visas loisirs aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois.