SOC.

OR

COUR DE CASSATION


Audience publique du 28 septembre 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 1090 F-D

Pourvoi n° E 20-23.613

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

La société Elior services propreté et santé (ESPS), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 8], a formé le pourvoi n° E 20-23.613 contre le jugement rendu le 20 octobre 2020 par le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence (section commerce), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [L] [K], domiciliée [Adresse 1],

2°/ au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, après débats en l'audience publique du 12 juillet 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

  1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, 20 octobre 2020), rendu en dernier ressort, Mme [K], engagée par la société Elior services propreté et santé (la société ESPS) en qualité d'agent de service et affectée sur le site de nettoyage de la clinique des [4] à [Localité 5], a saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de primes de treizième mois et d'assiduité versées aux salariés de la même entreprise, travaillant sur le même site de nettoyage de la clinique des [4] à [Localité 5] et sur ceux de la polyclinique de [Localité 7], de [6] et de la clinique d'[3], en application du principe d'égalité de traitement.

  2. Le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône (le syndicat) est intervenu à l'instance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

  1. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

  1. L'employeur fait grief au jugement de le condamner à verser à la salariée une somme à titre de rappel de prime de treizième mois et au syndicat une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que l'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner l'exposante à verser à Mme [K] la prime de 13e mois réservée aux salariés transférés de la Clinique des [4], que " cet article [L. 1224-1 du Code du travail] impose de démontrer qu'il s'agit d'une entité économique autonome " et que " la société ne démontre en rien qu'elle remplit les conditions de l'article susvisé ", sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si ces salariés n'avaient pas été transférés à la suite d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du Code du travail, de sorte que l'obligation mise à la charge de la société exposante de maintenir les éléments de rémunération des salariés de la Clinique des [4] justifiait la différence de traitement avec Mme [K], non concernée par ce transfert, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail et du principe d'égalité de traitement. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d'égalité de traitement et l'article L. 1224-1 du code du travail :

  1. L'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de reprise du contrat de travail du salarié d'une entreprise par application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de maintenir à son bénéfice les droits qui lui étaient reconnus chez son ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés.

  2. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime de treizième mois au titre de la comparaison avec des salariés transférés de la clinique des [4], le jugement relève que le 1er juillet 2010, la clinique des [4] à [Localité 5] a décidé d'externaliser ses services de bio nettoyage en les confiant à la société Hôpital service et que cette dernière, reprenant les salariés affectés à ce service, va, par contrat de travail, accorder une prime de treizième mois. Il retient qu'après analyse des pièces transmises par les parties, la salariée est placée dans une situation comparable en terme de technicité, fonctions, tâches et charge de travail, avec le personnel ayant perçu une prime de treizième mois. Il ajoute que l'employeur veut faire application de l'article L. 1224-1 du code du travail dans le cadre du transfert des salariés, que cet article impose de démontrer qu'il s'agit d'une entité économique autonome, mais que la société ESPS ne démontre en rien qu'elle remplit les conditions de l'article susvisé.

  3. En se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si l'employeur avait fait une application volontaire de l'article L. 1224-1 du code du travail, de sorte qu'il était fondé à maintenir l'avantage de treizième mois au seul bénéfice des salariés transférés, sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d'égalité de traitement, le conseil de prud'hommes n'a pas donné de base légale à sa décision.

Sur le deuxième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches

Enoncé du moyen

  1. L'employeur fait le même grief au jugement, alors :

« 4°/ que constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et explicite de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner l'exposante à verser à Mme [K] la prime de 13e mois versée à quelques salariés du site de [Localité 7], que " Mme [S], explique que la prime de 13e mois est liée à une erreur comptable et non à un problème relatif au nouveau logiciel, comme l'affirme le défendeur dans ses conclusions " et que " l'entreprise a continué à verser ces primes, créant ainsi une mise en place unilatérale de celle-ci ", sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si la remise en cause systématique par la société ESPS, via l'appel et le pourvoi en cassation, de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamnée à verser la prime de 13e mois aux salariés du site de [Localité 7] n'était pas de nature à exclure toute intention libérale d'accorder à ces salariés la prime litigieuse et à justifier ainsi la différence de traitement avec Mme [K], le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail, 1103 et 1104 du code civil ;

5°/ que lorsque la différence de traitement invoquée trouve sa source et sa justification dans l'effet relatif de la chose jugée, les salariés ne peuvent revendiquer un avantage sur le seul fondement des effets d'une décision rendue dans une instance où ils n'étaient ni parties ni représentés ; qu'en affirmant, pour condamner l'exposante à verser à Mme [K] la prime de 13e mois versée à certains salariés du site de [Localité 7], que "l'entreprise a continué de verser ces primes, créant ainsi une mise en place unilatérale de celle-ci", sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si la continuité des versements de la prime de 13e mois ne résultait pas de l'exécution de décisions de justice, de sorte que la différence de traitement avec Mme [K], qui n'était pas partie aux procès, était justifiée objectivement, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

  1. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime de treizième mois au titre de la comparaison avec certains salariés du site de nettoyage de la polyclinique de [Localité 7], le jugement retient que sur les attestations de Mme [S], celle-ci explique que la prime de treizième mois est liée à une erreur comptable et non à un problème relatif au nouveau logiciel, comme l'affirme l'employeur dans ses conclusions et comme l'a relaté également M. [R] dans son attestation, d'autant que l'entreprise a continué à verser ces primes, créant ainsi une mise en place unilatérale de celle-ci.

  2. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur clair et non équivoque, et sans rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si le versement de la prime litigieuse à compter de novembre 2012 aux salariés du site de nettoyage de la polyclinique du Languedoc à [Localité 7] ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de salariés qui avaient saisi la juridiction prud'homale d'une demande identique, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale.

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

  1. L'employeur fait grief au jugement de le condamner à verser à la salariée une somme au titre de la prime d'assiduité de juin 2014 à 2017 et au syndicat une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qu'ils tiennent d'un usage ou d'un engagement unilatéral en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger que les salariés du site de [6] qui percevaient une prime d'assiduité de 200 euros par an n'avaient pas été transférés de plein droit à la société exposante, de sorte que la différence de traitement avec Mme [K] n'était pas justifiée, que "d'autres salariés ont obtenu ladite prime sans qu'elle ne soit prévue dans leur contrat de travail", quand l'application de plein droit de l'article L. 1224-1 du code du travail n'impose pas la contractualisation des droits non contractuels dont bénéficiait le salarié au jour de son transfert, le conseil de prud'hommes a statué par motifs inopérants, privant en conséquence sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail et du principe d'égalité de traitement. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d'égalité de traitement et l'article L. 1224-1 du code du travail :

  1. L'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qu'ils tiennent d'un usage en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés.

  2. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime d'assiduité au titre de la comparaison avec des salariés du site de nettoyage de [6], le jugement retient que le fait que d'autres salariés ont obtenu ladite prime sans qu'elle ne soit prévue dans leur contrat de travail, place la salariée dans une situation d'inégalité de traitement. Il ajoute qu'il ne ressort des conclusions et des pièces de l'employeur aucun élément probant et vérifiable sur la différence de traitement.

  3. En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le versement de la prime litigieuse ne résultait pas de l'obligation légale pour la société ESPS, de maintenir la prime qui avait été consentie à certains salariés par la société Hôpital service, leur ancien employeur, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Elior services propreté et santé à verser à Mme [K] les sommes de 535,31 euros à titre de rappel de prime de treizième mois, 1 660,90 euros au titre de la prime d'assiduité de juin 2014 à 2017, et au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement rendu le 20 octobre 2020, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Marseille ;

Condamne Mme [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Elior services propreté et santé ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Elior services propreté et santé

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société ESPS fait grief au jugement attaqué d'avoir dit le Conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence territorialement compétent et de l'avoir, en conséquence, condamnée à verser à Madame [K] les sommes de 535,31 € à titre de rappel de prime de 13ème mois et de 1 660,90 € au titre de la prime d'assiduité, et au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône la somme de 100 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'UNE PART, QU'aux termes de l'article R 1412-1, alinéa 3 du Code du travail, le salarié peut toujours saisir, à son choix, le conseil de prud'hommes du lieu où est établi l'employeur, soit qu'il dispose dans le ressort de cette juridiction d'un établissement impliqué dans le litige dont le responsable a un pouvoir de représentation de l'autorité centrale, soit qu'il y ait un siège social ; qu'en se bornant à affirmer, pour se déclarer territorialement compétent, que « la société ESPS a un établissement à Meyreuil », sans cependant constater l'existence, au sein de cet établissement, d'un responsable doté d'un pouvoir de représentation de l'autorité centrale, le Conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence a privé sa décision de base légale au regard de l'article R 1412-1 du Code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART et subsidiairement, QUE le motif hypothétique équivaut à un défaut de motif ; qu'en affirmant, pour justifier sa compétence territoriale, que « Madame [K] saisit le Conseil de prud'hommes du lieu où l'employeur est établi par le biais d'un représentant, ce qui serait le cas de l'établissement de Meyreuil », quand l'emploi de ce verbe au mode conditionnel n'était pas justifié par des raisons grammaticales et que l'existence d'un représentant de l'employeur au sein de l'établissement de Meyreuil n'avait pas été évoquée dans les conclusions de Madame [K], le Conseil de prud'hommes a statué par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN, QU'aux termes de l'article R 1412-1, alinéa 3 du Code du travail, le salarié peut toujours saisir, à son choix, le conseil de prud'hommes du lieu où est établi l'employeur, soit qu'il dispose dans le ressort de cette juridiction d'un établissement impliqué dans le litige dont le responsable a un pouvoir de représentation de l'autorité centrale, soit qu'il y ait un siège social ; qu'en se bornant à affirmer que « la société ESPS a un établissement à Meyreuil » et que « Madame [K] saisit le Conseil de prud'hommes du lieu où l'employeur est établi par le biais d'un représentant, ce qui serait le cas de l'établissement de Meyreuil » pour affirmer que « le Conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence est compétent », sans cependant constater l'implication de l'établissement de Meyreuil dans le litige opposant Madame [K] à la société ESPS, le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article R 1412-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire au premier moyen)

La société ESPS fait grief au jugement attaqué de l'avoir condamnée à verser à Madame [K] la somme de 535,31 € à titre de rappel de prime de 13ème mois et au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône la somme de 100 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'obligation à laquelle est tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner l'exposante à verser à Madame [K] la prime de 13ème mois réservée aux salariés transférés de la Clinique des [4], que « cet article [L. 1224-1 du Code du travail] impose de démontrer qu'il s'agit d'une entité économique autonome » et que « la société ne démontre en rien qu'elle remplit les conditions de l'article susvisé », sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si ces salariés n'avaient pas été transférés à la suite d'une application volontaire de l'article L. 1224-1 du Code du travail, de sorte que l'obligation mise à la charge de la société exposante de maintenir les éléments de rémunération des salariés de la Clinique des [4] justifiait la différence de traitement avec Madame [K], non concernée par ce transfert, le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du Code du travail et du principe d'égalité de traitement ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE les juges sont tenus de respecter les termes du litige; qu'en affirmant, pour condamner l'exposante à verser à Madame [K] une prime de 13ème mois, que « le transfert dont il s'agit consiste à avoir externalisé des services de bio-nettoyage de la Clinique [3] », que « la société ESPS n'apporte aucune preuve permettant d'apprécier les éléments corporels significatifs qui auraient été transférés par la clinique [3] lors de cette opération » et que « la présence dans le contrat de travail du fait que le transfert s'était opéré en application de l'article L. 1224-1 ne saurait suffire à changer la nature dudit transfert », quand il ressortait des conclusions des parties qu'aucune prime de 13ème mois n'était versée aux salariés transférés de la Clinique [3], le Conseil de prud'hommes a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en affirmant, pour condamner l'exposante à verser à Madame [K] la prime de 13ème mois versée par erreur à certains salariés du site de [Localité 7], que « Madame [S] explique que la prime de 13ème mois est liée à une erreur comptable et non à un problème relatif au nouveau logiciel, comme l'affirme le défendeur dans ses conclusions », quand la société ESPS avait expressément fait valoir, dans ses conclusions, que « le versement unique de cette prime résulte d'une confusion du service paye de la société à la suite d'une condamnation » (p.43), le Conseil de prud'hommes a dénaturé les termes clairs et précis des écritures de la société, en violation du principe susvisé ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et explicite de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés; qu'en se bornant à affirmer, pour condamner l'exposante à verser à Madame [K] la prime de 13ème mois versée à quelques salariés du site de [Localité 7], que « Madame [S], explique que la prime de 13ème mois est liée à une erreur comptable et non à un problème relatif au nouveau logiciel, comme l'affirme le défendeur dans ses conclusions » et que « l'entreprise a continué à verser ces primes, créant ainsi une mise en place unilatérale de celle-ci », sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si la remise en cause systématique par la société ESPS, via l'appel et le pourvoi en cassation, de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamnée à verser la prime de 13ème mois aux salariés du site de [Localité 7] n'était pas de nature à exclure toute intention libérale d'accorder à ces salariés la prime litigieuse et à justifier ainsi la différence de traitement avec Madame [K], le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail, 1103 et 1104 du Code civil ;

ALORS, DE CINQUIEME ET DERNIERE PART, QUE lorsque la différence de traitement invoquée trouve sa source et sa justification dans l'effet relatif de la chose jugée, les salariés ne peuvent revendiquer un avantage sur le seul fondement des effets d'une décision rendue dans une instance où ils n'étaient ni parties ni représentés ; qu'en affirmant, pour condamner l'exposante à verser à Madame [K] la prime de 13ème mois versée à certains salariés du site de [Localité 7], que « l'entreprise a continué de verser ces primes, créant ainsi une mise en place unilatérale de celle-ci », sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si la continuité des versements de la prime de 13ème mois ne résultait pas de l'exécution de décisions de justice, de sorte que la différence de traitement avec Madame [K], qui n'était pas partie aux procès, était justifiée objectivement, le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire au premier moyen)

La société ESPS fait grief au jugement attaqué de l'avoir condamnée à verser à Madame [K] la somme de 1 660,90 € au titre de la prime d'assiduité de juin 2014 à 2017, et au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône la somme de 100 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qu'ils tiennent d'un usage ou d'un engagement unilatéral en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger que les salariés du site de [6] qui percevaient une prime d'assiduité de 200 € par an n'avaient pas été transférés de plein droit à la société exposante, de sorte que la différence de traitement avec Madame [K] n'était pas justifiée, que « d'autres salariés ont obtenu ladite prime sans qu'elle ne soit prévue dans leur contrat de travail », quand l'application de plein droit de l'article L. 1224-1 du Code du travail n'impose pas la contractualisation des droits non contractuels dont bénéficiait le salarié au jour de son transfert, le Conseil de prud'hommes a statué par motifs inopérants, privant en conséquence sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du Code du travail et du principe d'égalité de traitement ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont rattachés les droits qu'ils tiennent d'un usage ou d'un engagement unilatéral en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger que les salariés de la Clinique [3] n'avaient pas été transférés de plein droit à la société ESPS, de sorte que la différence de traitement avec Madame [K] n'était pas justifiée objectivement, que « la société ESPS n'apporte aucune preuve permettant d'apprécier les éléments corporels significatifs qui auraient été transférés par la Clinique [3] lors de cette opération », sans cependant rechercher, ainsi qu'il y était expressément invité, si l'activité de bio-nettoyage exercée au sein de la Clinique [3] ne constituait pas une entité économique autonome ayant maintenu son identité lors du transfert, vers la société ESPS, de tous les salariés affectés à cette activité, le Conseil de prud'hommes, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du Code du travail et du principe d'égalité de traitement.